lundi 20 juin 2011

3ème partie : ILE DE PAQUES / VALPARAISO

L'ILE DE PAQUES : juin 2011.



Pas trop de détails, pas trop d'explications, imaginez seulement une île (environ 20 km x 15 km) sous les tropiques mais avec des allures de parc auvergnat.

Pas de palmiers ni de cocotiers mais un climat doux et ensoleillé, pas d'atoll ni de corail mais de grandes prairies à l'herbe haute dans toutes les nuances de vert sur les flancs arrondis de volcans profondément assoupis.
Et puis partout cette magie et ce mystère qui flottent et se rappellent à vous à chaque détour de chemins avec ces statues magistrales qui vous guettent et vous surveillent.
Pas de cours d'histoire ou d'archéologie car il n'y a que légendes et suppositions autour de cette civilisation disparue brutalement. Mais renseignez-vous un peu sur son histoire, regardez quelques photos, détendez-vous pour une fois, laissez-vous envouter par cette alchimie délicate et je gage que vous serez nombreux à avoir envie de venir voir cela de plus près.








Pour nous ces quelques jours furent trop courts. Forcément j'ai été tentée d'y rester 3 semaines de plus, le temps que Philippe emmène Mowgli à Tahiti mais ça c'est une autre histoire, et pourquoi pas s'y installer et y vivre tout simplement ? ...
Une petite anecdote quand-même car nous partagions la même pension ("Chez Jérôme", que du bien à en dire) avec Bernard de la Marine Nationale en charge des secours en mer du Pacifique autour de la Polynésie Française. Et bien CE Bernard est celui qui avait pris en charge Philippe par radio et téléphone satellite, 4 ou 5 jours, lors de son approche de Tahiti et son rapatriement en décembre dernier pour ses calculs rénaux. Ils ne s'étaient jamais rencontrés physiquement, c'est chose faite. Encore un grand merci Bernard.
Avec une fois de plus le sentiment d'avoir vu un endroit unique sur notre petite planète, nous reprenons l'avion pour Valparaiso la mythique.












VALPARAISO.
Mythique pour tous les passionnés de vieux bateaux, de Cap Horniers héroïques, de romans d'aventures, adeptes de Jack London et autres. On y va comme on fait un pélerinage en se recueillant face aux images qu'ont vu nos héros disparus et en mettant les pas dans ceux de nos aventuriers romanesques.
Il faut aussi un peu d'imagination car s'il y a quelques rares coins intéressants, c'est surtout la vision d'une ancienne gloire qui s'accroche, imaginez Marylin Monroe, elle aurait 80 ans aujourd'hui ... Heureusement un petit hôtel sur les hauteurs avec une vue magnifique et l'épaisseur de l'air que l'on respire en visitant la maison de Pablo Neruda vous portent et vous aspirent dans vos souvenirs et rêves d'un passé disparu.











les célèbres ascenseurs de la ville

SANTIAGO DE CHILE




Dernière étape de ce triptyque, Santiago. Ville neuve, propre, moderne avec tous les attraits et inconvénients d'une capitale d'aujourd'hui, sans réel passé prestigieux ou vestiges témoins mais avec beaucoup d'avenir et d'espoirs. Nous avons quand-même fait le détour par le palais présidentiel de la Moneda et vu la fenêtre du bureau où Salvador Allende a héroïquement fini ses jours : suicide ou assassinat à chacun sa théorie et ses croyances ....




En fait nous étions là pour passer un test d'anglais nécessaire à l'obtention de notre visa de résidents australiens. Philippe comme d'habitude dira "tu verras, une formalité". Tu parles oui ! Nous nous sommes retrouvés à 50 dans une grande salle à plancher sévère pendant 4 heures ! Bon tout va bien et on verra les résultats le mois prochain. Et oui l'échéance approche, en décembre c'est l'Australie, fin de ce voyage et début d'une nouvelle aventure. Emma a reçu la confirmation de son inscription à l'école primaire de Kangaroo Point à Brisbane et nous les projets d'installation et projets professionnels vant bon train, avec des questions difficiles comme de savoir si on garde notre fidèle Mowgli ou si on le vend pour s'installer plus confortablement à terre ?!
Pour l'instant nous voilà de retour à bord et à Puerto Montt en pleine révision du bateau, maintenance, petits travaux, nettoyage, avitaillements etc .... Nous nous repréparons car d'ici 1 petite semaine, nous repartons pour les Gambier (Polynésie Française) avec devant nous une traversée de 4200 milles (7600 km) et environ 28 jours de navigation. C'est peu dire que la préparation est autant matérielle que psychologique ! Alors à bientôt car l'aventure continue ...

samedi 18 juin 2011

2ème partie : Un catamaran sur les Canaux de Patagonie

Errance d'un catamaran dans les canaux de Patagonie : 23 février au 14 mai 2011.

Et c'est reparti, Thierry s'est envolé pour Nouméa donc le frigo reprend une utilisation normale ... et nous sommes à nouveau tous les 3 pour les prochains 1000 milles et 7 prochaines semaines.

Quelques jours encore sur Puerto Natales et le Seno Eberhard.




Nous continuons notre errance dans cette mosaïque de canaux noyés le plus souvent sous d'épais rideaux de pluie et de brouillard.



D'épaisses couronnes nuageuses prennent en écharpe les sommets à peine visibles. Tout seul, c'est la bonne expression car le premier mois nous ne verrons PERSONNE, juste un petit bateau de pêcheurs locaux mais à part ça, nada, pas un village, pas une âme qui vive, pas une lumière, aucun signe de civilisation, nous seuls au milieu de cette superbe nature, pas facile même parfois un peu rude mais tellement généreuse.






Les journées de navigation sont intimement liées aux conditions météo du jour, ici le vent est roi et donne le tempo. Un vent sans trêve qui vous saute au visage, ce vent permanent qui ne décolère pas et qui pourtant n'est jamais le même, un vent obsédant. "On ne sait toujours pas comment a été inventé le vent mais maintenant on sait où !" dixit Philippe après quelques rafales à 45 noeuds ! Parfois nous arrivons à naviguer 2 ou 3 jours de suite, parfois nous restons cachés, bloqués pendant 5 à 6 jours sous un déluge quasi permanent et des vents entre 30 et 50 nds.


Heureusement il y a pléthore de petites Caletas incrustées dans une côte déjà très découpée et dans la végétation ou au détour d'une île solitaire au milieu de ce labyrinthe de chenaux.

Tous les fins d'après-midi c'est le rituel pour trouver , puis rentrer dans ces petits mouillages puis manoeuvrer pour se mettre au plus près, à l'abri derrière les rochers et arbres. Nous avons par la force des choses amélioré notre technique. D'abord dès que nous rentrons dans la caleta de notre choix, nous repérons le bon coin, Philippe met l'annexe à l'eau et part en éclaireur pour jauger les fonds et repérer le rivage. Pendant ce temps je fais pivoter Mowgli et recule tout doucement dans sa direction tout en mouillant l'ancre. Arrivé à quelques mètres à peine de la berge, Philippe attrape les amarres et les déroule pour nous fixer autour de rochers ou de gros arbres pendant que je reste aux moteurs à stabiliser le bateau (autre opération délicate consiste à éviter le kelp). Une fois toutes les amarres fixées en toile d'araignée et le bateau bien sécurisé, soit 1 heure plus tard, nous sommes prêts pour n'importe quelle tempête !





Il ne reste plus qu'à tout refaire à l'envers demain matin !Au fond de ces fjords austères et graves, les dauphins apportent la fantaisie et la légéreté : quelques courses poursuites en annexe et de bonnes douches bien glacées.L'un de nos plus beaux mouillages : la caleta Sally

Nous faisons donc route au Nord pendant 1 mois, jamais lassés et toujours époustouflés par ce spectacle de bout du monde et d'origine du monde. Nous nous imprégnons de ces immensités venteuses, de ces solitudes absolues, de cette terre où rien n'arrive.





Il faut un tempérament bien trempé pour ne pas s'effrayer de ce théâtre grandiose où pluies persistantes et vents impitoyables sont au rendez-vous la majeure partie de l'année. La pluie, un phénomène ordinaire et quotidien qui tambourine sur le roof, dégouline pendant des heures, remplit le jour et la nuit. D'où ces visions étonnantes que ces montagnes enneigées, ceinturées de forêts impénétrables et de côtes de granit d'où ruissellent des cascades sans cesse balayées par les vents.Et soudain un rayon de soleil, la Patagonie c'est aussi le royaume des arcs en ciel.

En arrivant à Puerto Eden nous retrouverons quelques bateaux copains et finiront les 3 dernières semaines jusqu'à Chiloé en nous recroisant de temps à autre.

Puerto Eden : au fond d'une baie marécageuse cernée de montagnes et de solitude se dresse un village. Quelques baraques sur pilotis construites de bric et de broc, 130 habitants, une communauté de pêcheurs dont le seul lien avec le monde est le passage du cargo.

Escale aux îles de CHILOE : un univers magique et singulier où priment mythes, légendes et superstitions. Bons ou mauvais esprits rythment le quotidien des chilotes. Les chilotes ont la tradition du voyage, une habitude de l'errance peut-être liées au sang indien qui coule dans leurs veines. Et quelle splendeur que leurs "palafitos", ces maisons de pêcheurs sur pilotis recouvertes de bardeaux et capables de résister aux plus fortes marées.

Au début ce retour à une "vie sociale" nous a presque fait peur surtout que l'on était si bien tous les 3 dans notre aventure mais le peu de marins qui naviguent dans ce coin ont en général un capital sympathie important mais en plus les 3 ou 4 bateaux concernés sont plus qu'exceptionnellement sympas.







Partis le 3 mars de Puerto Williams près du Cap Horn, c'est le 14 mai et 2700 km plus tard que nous arrivons à Puerto Montt (1000 km au sud de Santiago du Chili) dans le Club Nautico Reloncavi. Première marina, premiers conforts, première vraie ville, quasi premier Mac Do depuis la Nouvelle-Zélande en novembre dernier il y a 18 000 km (10 000 milles) !


Il est des paysages et des moments qui restent à jamais gravés dans la mémoire, ils s'imposent à nous avec une intensité bouleversante. Errer dans ces canaux fut une invitation à penser. La Patagonie, un monde où les mots pour décrire les couleurs et les lumières sont encore à inventer, une terre dont on sait qu'on ne reviendra pas indemne, dont on sait qu'on ne reviendra pas tout à fait ...

Le splendide glacier PIE XI

un dauphin nous montrant la voie au milieu des glaçons ...

Emma prête pour la baignade : rassurez-vous, elle n'y trempera que le bout de ses orteils.










Une journée rare de magnifique navigation ...


Nous sommes contents sur le coup d'en avoir fini avec cette navigation exigente, ce climat rude et apprécions ce nouveau confort. Mais en même temps un soudain et énorme cafard nous tombe sur le dos pendant quelques heures en repensant à l'intensité de notre aventure depuis 6 mois, le respect pour les marins rencontrés, l'amitié et solidarité palpables à chaque rencontre (ou presque ...). Alors coucou , merci et au revoir à tous, sans les citer pour ne pas en oublier avec un encouragement tout particulier à nos héros du Mar y Poles !

Mais c'est reparti et l'aventure continue, nous abandonnons Mowgli 2 semaines pour l'avion et direction Valparaiso la mythique, l'Ile de Pâques la mystérieuse et Santiago l'incontournable. A bientôt.