vendredi 13 mai 2011

1ère partie : Un catamaran en Tierra del Fuego et les glaciers de la Cordillère Darwin

Un catamaran en Tierra del Fuego et les glaciers de la Cordillère Darwin.


A l'extrême confins du monde, une bande de terre égarée, évocatrice de rêves les plus fous : la Terre de Feu. Steppes, lacs, forêts et glaciers composent les paysages de ce territoire où vient mourir la Cordillère des Andes.


C'est ici à Ushuaia, dans sa partie argentine, que l'on rencontre les plus fanstasques personnages et aventuriers, ivres d'expériences insolites, les plus fous des fous comme ceux parcourant le continent sur d'improbables véhicules. C'est aussi une étape incontournable des voiliers : un bourdonnement de vie avant d'affronter la solitude des canaux fuégiens et patagoniens, avant de se mesurer au Royaume du vent, de la pluie et des 40èmes rugissants et 50èmes hurlants.



C'est aussi à partir d'ici que n ous rencontrerons des gens hors normes, des marins d'exception, des êtres qui vous marquent pour une vie. A partir d'ici les mots d'ordre sont : entraide, bonne humeur, humilité, gentillesse. Que d'instants rares partagés pour quelques heures ou quelques jours avec Ocean Respect, Uhambo, Badoc, Spirit of Sydney, Imaqa, Menkar, Taurus ..... que de soulagement grâce à Esprit d'Equipe qui nous sauvera notre remontée en nous prêtant une pièce pour notre guideau défectueux.


Et puis un chapitre entier de ce blog ne serait pas de trop pour notre amie Claude et ses 2 adorables filles, Mia et Emma (du fameux voilier VAIHERE), que de sourires, d'attentions et d'immense bonté surgis d'un seul coup dans le carré de Mowgli (merci aussi à Eric de l'aide apporté à Philippe, vu l'effet que tu lui as fait j'aurais aimé te rencontrer).


Tout le long de notre errance l'homme rencontré sait avant tout ETRE HUMAIN. L'adversité des éléments font que les gens sont naturellement et spontanément solidaires. C'est une lutte acharnée que de vivre et survivre dans ces contrées : Terre de début ou de fin du monde ?!

Puis avant de se lancer à l'assaut des glaciers de la Cordillère Darwin, étape obligatoire à Puerto Williams, partie chilienne, la ville la plus australe au monde. Ambiance particulière dans cette petite localité militaire : ici on tremble d'exaltation à l'idée du départ. Départ pour l'Antarctique, départ pour le Cap Horn, départ pour les canaux ... les voiliers s'amarrent au Micalvi, vieux cargo allemand de 1925 échoué, transformé en bar où vieilles légendes marines s'échangent autour d'un Pisco Sour (boisson alcoolisé nationale).


De là nous rejoint pour plus de 2 semaines Thierry (Alofi). Une occasion également pour moi de me perfectionner dans le maniement du bateau avec Philippe derrière mon épaule pour me coacher car les manoeuvres de mouillage et d'amarrage peuvent parfois être sportives. Mais nous reviendrons sur ce sujet plus tard. Allez en route pour cet immense territoire austère et farouche où se mêlent à l'infini la terre et la mer. Un monde tragique fait de canaux, de fjords, de glaciers, de marécages et de forêts impénétrables.

L'une de nos 1ères étapes singulières sera le mouillage de Yandegaya, une étendue sauvage, une immense ferme d'élévage cernée de montagnes inexplorées et ponctuée de lacs isolés. Le seul "quartier habité" (1couple) jusqu'à Puerto Natales, soit quelques 530 miles plus loin !

Et soudain un mouillage très insolite. Comme une oasis surgie d'un rêve, une plage et une eau aux couleurs turquoise et émeraude, une exception, un havre de paix, la Caleta Olla avant d'affronter ce monde chaotique comme inachevé.

Hormis quelques anses abritées, "caletas" où l'on peut parfois débarquer, ce ne sont que vallées embrumées, glaciers inacessibles, forêts marécageuses et montagnes lointaines qui s'offrent au regard.

La Caleta 5 Estrellas, l'une de mes préférées, avec son entrée un peu délicate, coupée totalement du monde et empreinte de mystère avec sa forêt magique ou jungle du malheur comme l'appelle Emma.

la Caleta Brecknock noyée sous une pluie immuable, imperturbable ...


Quelques crochets pour naviguer en terrain délicat entre ces glaciers bleus et ces pics verdoyants et abrupts qui descendent jusqu'au bord de l'eau. Et là entre 2 masses rocheuses, fascination que de contempler ces immenses colonnes de glace qui jaillissent de l'eau et d'où se détachent à intervalles réguliers des tronçons qui se brisent en un fracas assourdissant.
Seno Espana Seno Pia Caleta Beaulieu De l'espace et du temps répété à l'infini, encore et encore ...





































Après une 1ère tentative infructueuse de la remontée du Canal de Magellan (vent violent et houle agitée!) une fenêtre météo se présente enfin nous permettant de le remonter jusqu'à son extrémité ouest (côté Pacifique) d'une traite en moins de 20 heures. Beaucoup de bateaux amis n'auront pas cette chance et la plupart resteront bloqués environ 1 semaine avant de pouvoir le franchir. Puis petit crochet par la civilisation, arrêt à Puerto Natales afin d'y déposer Thierry, refaire les pleins et notamment de carburant (eh oui il fait froid, très froid alors on chauffe plus que prévu). Et nous avons parcouru déjà 1 000 km dans ce dédale, il en reste le double loin de Tout et de Tous. Un monde entier en quelque sorte et cette fois-ci pour nous 3 seulement !